Louis Déjoie fils
Louis Déjoie, surnommé Louis Déjoie II, fils de Louis Déjoie -
sénateur -, vit le jour aux Cayes le 28 mai 1928.
Déjoie fils vécut en exil à Porto Rico avec ses parents, son père ayant
été le candidat évincé et craint de François Duvalier lors des
présidentielles de 1957 ; il y resta près de vingt-cinq années, avant de
pouvoir regagner sa terre natale à la chute des Duvalier père et fils. Il
embrassa alors le monde des affaires. Entre 1986 et 1990, il apporta son
soutien à toutes les causes démocratiques, au risque de sa vie. Quand on
omettait d'inscrire son nom sur les listes des «camoquins à assassiner»
(expression désignant les prétendus ennemis des Duvalier), il l'y ajoutait
lui-même. Déjoie II, c'était toute une histoire, toute une vie.
En 1990, il se porta candidat à la présidence de la république d'Haïti
sous la bannière que son père avait précédemment créée : le PAIN (Parti
national agricole et industriel), qui avait pour bastion les Cayes, troisième
ville d'Haïti et terre de ses ancêtres, parmi lesquels le général Fabre
Nicolas Geffrard. «Toute la bourgeoisie déferla sur lui : porte-parole à demi blanc,
secrétaire mulâtre, attaché de presse au teint clair, porte-valises
grimaud, bref la clientèle d'Ogé et de Chavannes. Les mauvaises langues
prenaient de la couleur. Mais Louis Déjoie II fit déchanter tout le monde,
il appela aussi à son secours les nègres marrons des mornes et des plaines,
les bonnes et domestiques de toutes les couches sociales du pays qui se
déversèrent vers lui. Les bras ouverts, il leur confia le PAIN. Se souvenant
que son père, fuyant Papa Doc, s'était tourné vers Fidel Castro avec à ses
côtés le fidèle Maurepas Auguste [homme politique, membre du PAIN] en 1958,
il choisit celui-ci pour bras droit.»
Apparaissant aux yeux des masses comme un héros, il s'avéra le candidat
le plus sincère, voire même le plus naïf, en dépit des calculs
acrobatiques du CEP (Conseil électoral provisoire) qui lui collait -comme à
son père en 1957 - des pourcentages insignifiants. (Adyjeangardy, le
Nouvelliste, 20 janvier 1998). La popularité de Louis Déjoie II atteignit de
tels sommets dans le Sud et sur le Plateau Central qu'elle lui valut dès lors
le surnom de «Ti-loulou», devenu légendaire. Il arriva en troisième
position, obtenant 4,9 % des suffrages exprimés. Il jugea bon de se rallier
à la partie victorieuse, heureux et satisfait d'avoir participé à des
élections libres, honnêtes et démocratiques, sans effusion de sang,
réalisées par le gouvernement d'Ertha Pascal Trouillot, avec l'assistance
d'observateur civils non armés de l'OEA (Organisation des États américains)
et de l'ONU ; voeu qu'il chérissait tant, surtout après le massacre de la
population aux élections de 1987, qualifiées de sanglantes et marquées au
fer rouge dans la mémoire du peuple haïtien. En 1993, il occupa le poste de
Ministre du Commerce et de l'Industrie.
Fauché en pleine activité, Louis Déjoie II succomba à un cancer du
côlon le 11 janvier 1998. Incinéré sur la terre de San Juan de Puerto Rico,
ses funérailles furent chantées le 20 janvier dans les murs de la
cathédrale de Port-au-Prince et ses cendres, dispersées, selon ses voeux,
dans la rivière des Cayes, sa ville natale. (Le Nouvelliste, 17 janvier 1998)
Déjoie avait épousé Ghyslaine Laraque, qui lui a donné trois enfants :
Louis A. Déjoie III, économiste vivant à Porto Rico, Tara Déjoie épouse
Rhoades et Geffrard Déjoie; puis sont venus les petits-enfants : Louis A.
Déjoie IV, Brena Déjoie et Joseph L. Rhoades.
par Ernst et Ertha P. Trouillot
Encyclopédie Biographique d'Haïti
Les Éditions SEMIS inc.,
(c) Ottawa 2001