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BELGIANS IN AMERICA:    Biographies of Belgian settlers  

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The settlers

The Catholic Missions

Eugène le hardy

Notice sur M. Eugène Le Hardy de Beaulieu


(écrite par Charles Le Hardy de Beaulieu, qui mourut à son tour le 4 avril 1875, un peu plus de trois mois après son frère)


Eugène Le Hardy naquit à Waterloo (Brabant) le 4 mai 1817. Sa jeunesse s'écoula au château. de Fichermont, situé sur le célèbre champ de bataille de Mont-Saint-Jean. Il était le second de neuf enfants.

Il fit ses premières études dans un bon pensionnat du voisinage, dont le chef devint plus tard directeur du collège de Wavre, où il continua ses études jusqu'en août 1831, époque où les Hollandais, envahissant la Belgique, s'approchèrent fort près de Wavre. Les élèves furent renvoyés chez eux. M. Le Hardy de Beaulieu père, ayant à cette occasion apprécié le mérite et le savoir d'un des professeurs, M. Polchet, l'engagea comme précepteur de ses enfants. C'est ce malheureux qui, un an plus tard, fut assassiné sur le chemin qui conduit au Lion de Waterloo

Après M. Polchet, Eugene et ses frères eurent d'autre précepteurs et firent à domicile les études nécessaires pour passer l'examen de candidat en philosophie et lettre, examen qu' Eugène subit avec succès en 1836. Il entra alors a l'Université libre de Bruxelles et passa, au bout d'un an, sa candidature en droit. - Mais ses goûts le portant plutôt vers les sciences exactes que vers la carrière judiciaire, il entra à l'école centrale que dirigeait avec tant d'éclat M. Labrousse, et y fit d'excellentes études. Il en sortit vers 1844.

Il entra alors dans les bureaux de son frère aîné, ingénieur civil, qui l'employa à divers travaux d'études de chemins de fer, et entre autres, à l'opération difficile et de longue haleine qui lui fut confiée par l'administration communale de Bruxelles: le nivellement général de la ville. Il mit dans ce travail qui exigeait une grande et minutieuse précision, au milieu du mouvement incessant d'une cité populeuse, une patience et un sang-froid qui lui permirent de surmonter toutes les difficultés pratiques.
En 1849, Eugène Le Hardy partit pour les Etats-Unis avec son plus jeune frère et une colonie d'une trentaine de Belges, dirigée par sont oncle, le général pensionné vicomte Le Hardy de Beaulieu.

Ils s'établirent à Rome, comté de Floydt, dans la haute Géorgie. Au bout de quelque temps, Eugène fut employé par divers planteurs du voisinage pour lever les plans de leurs propriétés; puis par la municipalité de Rome pour un plan d'agrandissement. Il fut bientôt chargé de vérifier les études d'un chemin de fer qui passait par Rome. La précision qu'il mit dans ce travail le fit remarquer des administrateurs de diverses compagnies avec lesquelles il avait été mis en rapport et il ne tarifa lias à voir ses services fort recherchés. En 1855, il fit les études d'un chemin de fer entre Dalton et Jacksonville, via Rome.

En 1856, sa réputation d'habileté et d'intégrité étant désormais faite, le gouvernement de la Géorgie le nomma directeur en chef des chemins de fer appartenant, à ce vaste État, (150,1M kil. carrés de surface), chemins de fer qui avaient été construits par l'État pour ouvrir une voie de communication rapide entre le nord et le sud de la Géorgie, entre les hautes terres et l'Océan.

Jusque là, cette route avait coûté an trésor au lieu de lui rapporter; le déficit était de plus d'un million par an. M. Le Hardy prit énergiquement en mains les rênes de cette importante administration, la fit sortir du domaine de la politique, en remercia les fonctionnaires malhonnêtes ou corrompus et, par quelques modifications heureuses aux courbes et aux rampes les plus défectueuses, il diminua considérablement les difficultés et les frais de l'exploitation. Le résultat fut tel, qu'au bout de deux ans, ces chemins de fer rapportaient déjà au Trésor une couple de millions de dollars de bénéfice net.

Il est facile d'imaginer les hostilités que lui suscitèrent d'abord des réformes aussi brusques et aussi radicales; mais il ne perdit pas un seul instant la confiance du gouverneur, ni celle de la législature qui le soutinrent énergiquement en plus d'une circonstance. Cependant en 1857, une coalition de ces fournisseurs, soutenue par des employés qu'ils avaient intéressés dans leurs affaires, fut assez puissante pour amener l'acceptation d'un pont et d'autres ouvrages d'art qu'Eugène Le Hardy avait refusés. Il donna immédiatement sa démission. Moins de trois mois après, le pont s'étant écroule, comme il l'avait prévu, le public qui avait appris ce qui s'était passé à cet égard, en manifesta une grande émotion, et le gouverneur de l'État rappela immédiatement Eugène à son poste.

En 1860, il demanda un congé pour visiter sa famille en Europe, où il devait aussi servir de guide et de secrétaire à une commission que, sur ses données, les producteurs des États du Sud avaient désignée à l'effet d'établir des relations directes entre ces États et la Belgique. Cette mission eut un plein succès; un comité de producteurs belges s'organisa et se mit en rapport avec la délégation américaine; et un contingent assez respectable d'articles belges fut envoyé à l'exposition industrielle de Macon (Géorgie). En même temps, les bases d'une société de commerce et de navigation étaient jetées. Malheureusement, la terrible guerre de Sécession bouleversa tous ces projets et les ruina ainsi que les États du Sud.

Cette guerre ayant interrompu les communications entre l'Europe et le sud des Etats-Unis, Eugène Le Hardy dut en attendre la fin avant de retourner en Amérique, ce qu'il fit au commencement de 1866. Dans l'intervalle, il parcourut une grande partie de l'Europe et exécuta, en Espagne, deux sections de chemins de fer, l'une en Catalogne, l'autre en Andalousie.

C'est aussi pendant ce séjour en Europe, qu'il composa une petite brochure sur diverses circonstances mystérieuses qui ont précédé et suivi la mort du célèbre patriote polonais J. Lelewel, qui avait été en grandes relations d'amitié avec la famille.
Retourné aux Etats-Unis, Eugène Le Hardy trouva le poste de directeur général des chemins de fer de la Géorgie occupé; il dut donc chercher d'autres travaux; mais sa réputation de capacité et d'intégrité était telle qu'il ne tarda pas à être nommé ingénieur en chef de l'importante ligne de Dalton-Rome-Selma, dont il avait été le promoteur et l'auteur des plans. L'exécution de ce travail considérable (5 à 600 kilomètres) fut rapide; elle fut terminée au commencement de 1870. Notre ingénieur reçut alors un témoignage de confiance qui montre bien quelle était sa réputation de probité: des différends se chiffrant par plusieurs millions existaient entre la compagnie concessionnaire de cette ligne et les entrepreneurs qui l'avaient exécutée. 

Eugène de Beaulieu fut nommé par les deux parties, arbitre unique chargé de trancher souverainement ces contestations; et il s'acquitta de cette mission délicate de manière à faire admettre ses décisions comme justes, même par ceux qu'elles condamnaient.

En octobre 1874, M. Le Hardy se rendit à New-York, où il resta jusqu'en février 1873. Pendant ce séjour, il publia dans les journaux d'importants articles sur les ouvrages à faire à la rivière Coosa -principal affluent de l'Alabama qui passe à Rome, pour la rendre navigable, ainsi que sur la région riche en charbon et mines de fer, appelée contrée des Chérokées, dont Rome est le centre, etc. Mais il s'occupa, dès lors, surtout de machines à composer et à distribuer les caractères d'imprimerie.
S'étant intéressé dans une affaire de ce genre, il l'étudia à fond, fit de nombreux essais, se mit en rapport avec les principaux imprimeurs et ouvriers typographes, écouta leurs observations, reconnut les imperfections des machines qu'on lui avait vendues; et ayant appris, en même temps, que le promoteur de cette affaire n'avait que des droits incertains au brevet dont il se targuait, Eugène rompit avec lui et s'occupa, avec sa ténacité habituelle, de l'invention d'autres machines qui réunissent toutes les conditions voulues pour avoir un égal succès à celui des machines à coudre. A cette fin, il retourna à Rome, où il possédait une belle plantation près de la ville et où il pouvait travailler à l'aise et sans être distrait par des importuns.
Dans les derniers mois de 1873, ses plans étaient faits. Pour leur mise à exécution, il se rendit (avril 1874) à Savannah, port sur l'Océan, où son frère, le docteur Jules Le Hardy, l'avait mis en rapport avec un habile mécanicien qui pouvait exécuter le mécanisme délicat de cette machine. Ils travaillèrent ensemble avec ardeur et, au commencement de décembre 1874, Eugène annonçait à sa famille que la machine à composer marchait parfaitement et qu'il espérait que la machine à distribuer réussirait de même et pourrait fonctionner en mars ou avril 1875.

Il annonçait également (peu de mois auparavant) que le comité du Sénat des Etats-Unis, pour les transports, avait adopté le projet qu'il lui avait transmis autrefois, et en faveur duquel il avait publié divers mémoires et articles de journaux, à savoir le Great Atlantic and Western Canal, vaste voie navigable entre l'Océan et le Mississipi, laquelle devait notamment comprendre la rivière Coosa et passer par Rome, qui allait ainsi devenir un des grands marchés intérieurs du Sud-Ouest.

Eugène Le Hardy de Beaulieu était donc à la veille de voir réussir deux des projets auxquels il avait le plus travaillé, et qui devaient tout à la fois lui procurer une grande fortune et une grande renommée. Hélas! il devait avoir l'amertume de quitter cette terre avant de recueillir les fruits de ses longues veilles et de ses labeurs !

Au commencement de décembre, des affaires rappelèrent à Rome; de grands froids étant survenus à cette époque, Eugène prit un refroidissement en visitant sa plantation et en y ordonnant des travaux; une pneumonie se déclara; les docteurs pensèrent d'abord qu'ils en auraient facilement raison; mais le mal empira et passa d'un poumon à l'autre. Son frère Jules accourut alors de Savannah lui apporter ses soins et sa science; mais deux jours après (26 décembre 1874), il avait la douleur de le voir mourir dans ses bras.

Il n'avait que 57 1/2 ans, et sa forte constitution semblait lui promettre encore de longues années d'utile activité.
Cette mort causa d'universels regrets en Géorgie, en Alabama et dans plusieurs autres États où Eugène possédait de nombreux amis. Nous donnons plus loin la traduction de quelques uns des nombreux articles nécrologiques que les journaux américains lui consacrèrent.

Nous ne pouvons terminer cette courte notice sans dire quelques mots du caractère du cher défunt. A cet égard, il n'y a qu'une voix chez ses parents et amis : c'était le meilleur des hommes. Obligeance à toute épreuve, désintéressement antique, bonne humeur inaltérable, toutes les qualités qui rendent l'homme aimable se réunissaient chez lui il celles qui constituent l'homme cligne de tous les respects.

Il avait une aversion profonde pour le jésuitisme, tant civil que religieux, et aussi pour la corruption et les manoeuvres déloyales que se permettent certains partis pour s'assurer la victoire. Aussi était-il adversaire déclaré du président Grant et de son entourage qu'il accusait, d'avoir introduit aux Etats-Unis la corruption dans l'administration, - et depuis plus de deux ans, il avait prédit (ce qui vient de se réaliser) que les nègres mêmes se retourneraient bientôt contre ceux qui ne leur avaient donné les droits électoraux que pour pouvoir, avec leur appui, assouvir leur propre ambition ou leur cupidité.

Quoiqu'il habitât les Etats-Unis depuis 25 ans, il avait toujours gardé un grand amour pour son pays natal, et, dans ses dernières années, il reprit la plume pour prêcher de nouveau, aux États du Sud, l'établissement de relations directes avec l'Europe et surtout avec la Belgique.