The Diary of a Frenchman
 
 
 

Revue de livre
par
 Roger Hétu
 1 avril 2006 
 

 

Ce livre est en fait l'autobiographie de François Lambert Bourneuf écrite en 1859, éditée, annotée et traduite en anglais par Alphonse Deveau en 1990. Deux ans plus tard, Alphonse Deveau co-publia avec Sally Ross «The Acadians of Nova Scotia». Deveau avait publié en 1983 «L'abbé Le Loutre et les Acadiens», une brochure didactique.


Né en 1787 à Regnéville, France , (près de Granville, Coutances, St-Malo, St-Servan au sud ouest de la Normandie) les péripéties de Francois Bourneuf l'ont amené à devenir Acadien par alliance à la baie Ste-Marie où il mourut en 1871.

Quoique issus d'une famille bourgeoise, les Burnouf (devint Bourneuf en Nouvelle-Écosse) étaient probablement favorables à la révolution (1792-1799). Le père de François Bourneuf avait d'ailleurs en 1802 accompagné Jérome Bonaparte (le frère de l'empereur Napoléon) à la Martinique.

Quoiqu'il en soit notre jeune Bourneuf fut instruit par le pasteur de Regnéville, un homme de 300 livres qui n'hésitait pas à le frapper pour ses erreurs. C'était à l'époque où l'on ne blâmait pas un prêtre pour de tels abus. On priait plutôt le seigneur de lui accorder plus de patience. En 1798 il termina ses études dans un pensionnat d'état. Il était encore au pensionnat lorsqu'il fut atterré par la nouvelle du décès subit de sa mère.

Se relevant difficilement de cette perte, pour oublier il navigua pendant plusieurs mois avec son oncle le capitaine Lambert Bournouf, engagé dans le commerce côtier.

 
 

En service militaire, Francois Bourneuf est affecté en 1808 à la frégate "La Sirène" qui navigue entre St-Malo et la Martinique. Il va s'en dire que ces voyages sont ponctués de batailles navales épiques avec les flibustiers et autres navires de guerre britanniques. En juin 1809, Bourneuf est à bord de "La Furieuse" qui fut pourchassée près des Grands Bancs de Terre-Neuve. La Furieuse capitule devant la supériorité de la frégate britannique "Bonne Citoyenne". Bourneuf devient prisonnier de guerre et est incarcéré près de Halifax à l'île Melville (Petite île dans une petite baie, "Melville Cove" du North West Arm )

Les prisonniers de guerre sont bien traités par les Britanniques. On dit que c'est ce qui plus tard décida Francois Bourneuf à devenir sujet britannique.

Toutefois l'ennui incita Bourneuf à s'évader. Après quelques vaines tentatives il réussi à s'évader enfin en 1812 lorsqu'il travaillait à la construction du chemin Prospect. Il vola une embarcation à l'île Purcell et s'éloigna au large en espérant demander l'asile à l'un des nombreux corsaires américains qui infestaient ces eaux..

Pendant huit jours il navigua devant Liverpool et Shelburne sans apercevoir aucun pirate. N'ayant plus de provision il accosta à Port L'Hébert. Il fut fait prisonnier par la milice locale qui protégeait l'endroit contre les pirates américains. Après être emprisonné pendant 6 semaines à Shelburne il était sur le point d'être embarqué sur une corvette à destination d'Halifax lorsqu'il s'évada à nouveau.

C'est à Barrington, cherchant de la nourriture, qu'une femme lui apprend l'existence des Acadiens plus à l'ouest. C'est ainsi qu'il abouti à East Pubnico où il fit la connaissance des Simon D'Entremont, John Larkin's, Ange Amirault, Joseph Belliveau.

Il fut bien reçut par les Acadiens et il décrit son passage à l'Ile de Grave à Pubnico, à Eel Brook, à Tousket (aujourd'hui Wedgeport). C'est là durant l'hiver 1812-1813 qu'il rencontre un compatriote, Pierre Beaumont de St-Servan qui était sur le point de devenir bigame. Bourneuf avait rencontré sa femme en France.

Francois Bourneuf devint l'instituteur attitré de ce patelin. Faute d'école l'enseignement se faisait dans les maisons. Il connut les familles de Pierre Bourque, Pierre Surette, Pierre Muise, Jean & Joseph Belliveau, Jean Cottreau, Pierre Hinard, Antoine Richard.

Pierre Hinard retournait en France de St-Domingue lors que son navire dévia et échoua sur les côtes du Labrador. D'abord prisonnier des Esquimos, apperçu sur la plage, il fut rescapé par un brigantin britannique. Débarqué à Halifax il se rendit à Tousquet où il joignit les Acadiens en épousant Rosalie Muise.

Cottreau et Richard, français des Îles-St-Pierre-Miquelon furent capturés par les britanniques. Ils s'échappèrent et vinrent au Cap Sable où ils épousèrent des Acadiennes.

Bourneuf enseignait à Pubnico au printemps de 1813 lorsque Benoni D'Entremont, "Juge de paix", l'informa que les gens de Shelburne connaissait sa retraite. Il devait au plus tôt régulariser sa situation en utilisant l'influence du Père Sigogne de la Baie-Ste-Marie.

Refusant d'être sous la juridiction civile évolutionnaire, le Père Jean Mandé Sigogne avait quitté la France pour l'Angleterre. Il vient en Nouvelle-Écosse en 1799. Il avait des amis influents dans l'administration d'Halifax. Il était lui aussi "Juge de paix".

Chemin faisant, vers Church Point, Francois Bourneuf rencontre et décrit les familles de Archange Deveau, Antoine Grivois, Justinien Comeau, J.B. Thériault, Pierre Claude Saulnier, François Gilis, Joppé LeBlanc, Casimire LeBlanc.

Casimire Leblanc était né à Pisiquid. Déporté à St-Malo il s'établi à St-Servan. Après quelques excursions sur un navire corsaire il est blessé et soigné en France. C'est par un bateau Jersien qu'il retraversa l'Antlantique et débarqua à Arichat. De là il rejoignit la Baie Ste-Marie.

Bourneuf signe le serment d'allégeance le 20 mai 1813.

Après un peu d'enseignement et une tentative dans l'agriculture notre Bourneuf retourne à la mer. Pêcheur puis commerçant il brasse des affaires de plus en plus enrichissantes. Il construit plusieurs navires.

Il rencontre les Pierrotte Belliveau, John Snow, Mathurin Melanson, John Holden, Charles Melanson, Anselme Doucet, Pierre Bunel. (ce dernier était en exil de St-Pierre-Miquelon où il avait été inculpé de vol)

Il courtise Marie Doucet selon les coutumes acadiennes qu'il épouse vers 1819.

Devenu influent, il organise les levés de fonds suite au deux incendies de la Baie-Ste-Marie en 1820. (Ces deux incendies et celui de 1893 ont détruit tous les documents généalogiques de cette région)

C'est grâce à lui que l'église fut reconstruite en 1829.
En 1843 il se fait élire dans le Township anglophone de Digby. Il est MLA pendant 16 ans. En 1855 il construit le Malakov, un navire de 1800 tonnes. Son client ne peut payer et entraine Bourneuf dans sa faillite. Il ne se relèvera pas de cette déveine.

Lorsque Joseph Howe attaque le Catholicisme en 1857, nombreux députés catholiques incluant Bourneuf, quittent les libéraux, traversent la chambre dans le camp conservateur. En conséquence c'est la chute du gouvernement. Mais en 1859 les Libéraux retournent au pouvoir et Bourneuf perd son siège dans Digby.

Francois Bourneuf meurt en 1871, appauvri tant financièrement qu'en influence.

Quelques descendants bien connus:

François jr (Rosalie Melanson); Emile Bourneuf prêtre; Ambroise Bourneuf (Charlotte Doucet); Catherine Bouneuf (Willie Comeau); Aimée Bourneuf (Emile LeBlanc); professeur Alice E. Bourneuf.


Alphonse Deveau a tellement enrichi le texte de Bourneuf en préfaçant chaque chapitre et annotant les marges d'information sur les évènements historiques de cette époque, sur l'histoire des lieux visités, sur les personnes mentionnés et sur les us et coutumes acadiennes qu'il est en fait l'auteur du bagage historique qu'acquiert le lecteur.

Ce livre est une mine d'or d'information généalogique. Pour chaque personne mentionnée dans le texte de Bourneuf, Alphonse Deveau place une annotation marginale indiquant parfois leur alliance et/ou leur ascendance et/ou leur descendance et/ou leur provenance.

Facile à lire cette publication nous illustre à travers une époque de la révolution française (et américaine), des guerres napoléoniennes, la vie en Normandie, sur une frégate et sur la côte sud de la Nouvelle-Écosse.

Soi dit en passant que le patronyme «Burnouf» en Normandie est cité dans les revues d'anthroponymie comme ayant une origine scandinave. (voire Viking)