Occupation de Vaud par les Bernois, 1536-1798

Occupation de Vaud par les Bernois, 1536-1798:

Ce qu'ils ont fait et ce qu'ils n'ont pas fait.

Durant la période d'occupation bernoise, des générations de diplomates, de généraux et d'intellectuels ont apporté leurs commentaires sur la tutelle exercée par Leurs Excellences de Berne. Leurs Excellences désignaient plus précisément le conseil de la ville de Berne, au nombre de deux cents bourgeois environ, regroupés en plusieurs instances gouvernantes. On peut sans risque de se tromper affirmer ce qui suit :

Leurs Excellences ont :

taxé absolument tout, an amassant ainsi un incroyable pactole,
établi une sécurité relative, et fait régner l'ordre et la justice en Vaud,
enrôlé les hommes pour se battre aux quatre coins de l'Europe,
gouverné par décrets.

Leurs Excellences n'ont pas :

dépensé plus qu'une infime fraction des sommes collectées pour des projets profitant à Vaud,
construit ne serait-ce qu'une seule route en Vaud dans les 200 premières années d'occupation, du moins à notre connaissance,
entrepris les moindres travaux publics d'aménagement du territoire,
autorisé les cités et villages à effectuer les améliorations nécessaires ou les réformes,
promu les hommes qualifiés de Vaud à aucune position militaire de haut rang,
promulgé la moindre loi, de telle sorte qu'il n'y avait aucun code criminel ou civil cohérent en application, à aucun moment durant l'occupation,
entrepris quoi que ce soit dans le domaine de la santé publique,
encouragé en aucune sorte un sentiment de patriotisme envers la nation Bernoise dominante.

Du fait de l'immobilisme caractérisé et de l'exploitation par les Bernois, la population de Vaud a connu un déclin notoire, et ce malgré un large afflux de réfugiés Huguenots après 1685. Les premiers démographes ont souligné que la cause principale de ce déclin avait été l'absence d'aucune perspective d'avenir hormis le service militaire à l'étranger; de plus, si un paysan arrivait à amasser quelques économies, alors la meilleure façon de faire fructifier cet argent était encore d'émigrer.

Le régime Bernois a engendré un recours poussé aux hommes de loi. Du fait des litiges relatifs aux dettes en toutes sortes, des volumes impressionnants de documents ont été accumulés dans les consistoires, les tribunaux locaux, les instances de district, etc., à tel point qu'on peut retrouver trace d'à peu près tout adulte de Vaud dans les documents subsistant de nos jours.

On peut s'étonner de ce que les forces de Berne aient pu occuper Vaud sans rencontrer aucune opposition réelle en 1536. La raison en est que les Vaudois n'avaient pas oublié la barbarie des soldats de Berne en 1475-1476, une période de sauvagerie qui, d'après certains chroniqueurs, a contribué à réduire des deux tiers la population de Vaud. Si vous souhaitez en savoir plus sur cet intéressant épisode, reportez-vous au Livre 3, Chapitre IX de l'Histoire du Canton de Vaud de Verdeil. En 1536, il semble que la plupart des gens considéraient qu'il était plus sûr à long terme de coopérer avec les armées de Berne et de Fribourg que de tenter de s'y opposer.

Savoir plus :

Inventaire sommaire d'un registre des "mandats souverains," tenu par le Curial de Moudon, 1766-1796.

Matzinger-Pfister, Regula, Les sources du droit du Canton de Vaud. C. Epoque bernoise. I. Les mandats généraux bernois pour le Pays de Vaud, 1536–1798, Basel: Schwabe & Co., 2003.

L'administrateur de ce site est John W. McCoy Traduction française par Anne Bohy